Hamlet d’Ambroise THOMAS

Le programme, qui sera donné avec votre billet pour la séance du dimanche 30 avril 2023 à l’Utopie, (synopsis et distribution) peut être téléchargé en cliquant ici sur ce lien .

Quel Hamlet ?

Là est la question…

L’Hamlet d’Ambroise Thomas a pour lointain ancêtre Hamlet de Shakespeare, et lorsque cet Hamlet est « revisité » et embastillé par un metteur en scène tel que Warlikowski, la branche de l’arbre généalogique semble sur le point de casser…

Voici comment Ludovic Tézier, coiffé dune casquette à carreaux et non d’un entonnoir à l’envers, parle du rôle qu’il interprète :

Hamlet, ce n’est pourtant pas compliqué à comprendre (et à respecter). Mon psychiatre préféré (je veux dire celui que je relis toujours avec profit), Binswanger l’a très bien résumé : « Hamlet ‘échoue’ dans l’impossibilité de son amour de la mère, dans la vanité d’une réconciliation avec elle et ainsi dans l’impossible harmonisation de son existence ; car, ‘entre’ lui et la mère il y a, non pas ‘le père’, mais le crime de la mère contre le père ».
C’est pour cela que c’est une configuration « oedipienne » qui n’a rien à voir avec Oedipe. D’ailleurs pour les classiques, avant que l’on psychologise tout, il s’agissait d’une histoire de vengeance. Montrer Hamlet coucher avec sa mère est un malentendu total. Même violemment, c’est faux. Hamlet est plus proche, dramatiquement, d’Electre, de Sophocle, que d’Oedipe. Enfin, pensez ce que voulez…

Acte Iv, Ophélie, air de la folie, le début avec Lisette Oropesa dans un costume improbable mais avec sa voix pure :

Et si vous le souhaitez cliquez ici pour entendre Maria Callas dans ce même air

ou encore, cette interprétation sur scène de Natalie Dessay :

A l’opéra Comique, il y a eu récemment une version extraordinaire de l’oeuvre d’Ambroise Thomas, chanté par Stephane Degout, Sabine Devielhe… dans une mise en scène éblouissante. Voici la bande-annonce :

Raconter l’histoire (le pitch, comme ils disent maintenant) en une minute, montre en main. cela n’a aucun intérêt mais c’est le genre de choses que la technologie permet. Donc, quelqu’un l’a fait :

THEATRE :

Juillet 1960,Carcassonne : Dans les archives de l’Ina, vous pouvez consulter (en vous abonnant gratuitement pendant un mois) un enregistrement de la version jouée un soir en plein air, avec des acteurs qui s’époumonaient : première apparition de Mireille Darc (qui joue la Reine dans la scène du crime dirigée par Hamlet) et aussi Philippe Avron dans un petit rôle de cette même scène (ensuite il jouera Hamlet à Avignon en 1977). Les rôles principaux sont ici interprétés par Daniel Sorano et Maria Casarès !

Juillet 1977, donc, Philippe Avron : malheureusement dans cette video il faut attendre (ou aller directement) 3:20 pour voir enfin, brièvement Philippe Avron dans Hamlet…

Juillet 1987 Patrice Chéreau interrogé au moment de la création au Festival d’Avignon (Gérard Desarthe était Hamlet. Hamlet était Gérard Desarthe)

Autre interview dans lequel Patrice Chéreau énonce très clairement, à la fin, la question de la « folie » d’Hamlet…

La mise en scène très spectaculaire de Patrice Chéreau a ensuite été jouée à Nanterre, sur le grand plateau du théâtre des Amandiers, puis en tournée en Allemagne et à Moscou. Le spectre déboulant soudainement à cheval, comme on le voit en répétition sur cette video , et sur la photo ci-dessus, fit partout le même effet ébouriffant. Mais surtout la qualité dramatique de l’ensemble de la troupe !

A propos du spectre : à l’origine, au V siècle avant JC, du temps de Sophocle, le lien avec les instances surnaturelles avait lieu dans les temples (par exemple d’Apollon) par l’intermédiaire des oracles. Ce sont ces oracles qui prenaient la voix du dieu ou  parlaient comme les morts pour dire ce qu’il faut faire. Au temps de Shakespeare, le dialogue avec les morts donnent lieu à des apparitions : toute la force de la pièce est de montrer que ce ne sont pas des hallucinations d’Hamlet, mais une apparition collectivement partagée (enfin, par ceux à qui le mort ‘choisit’ de se montrer). Au XIX siècle, que ce soit Dumas ou les librettistes d’Ambroise Thomas, tout le monde baigne dans l’occultisme, les tables qui frappent des coups au sol pour s’exprimer, les médiums etc… tout ce que Philippe Muray a décrit dans « le XIX sièce à travers les âges »… Les deux dernières mises en scène récentes proposent des nouveautés : à l’Opéra Comique, dans la version chantée par Stéphane Degout, le spectre surgit en face de lui… parmi les spectateurs ! Le spectre est un spectateur, qui simplement attendait son tour pour se lever et chanter son rôle de sa place (si on y pense une seconde, ça veut dire quoi ?). et enfin, avec Warlikowski, le spectre devient tout simplement une sorte de clown ridicule. Comme ça, oui, c’est plus simple. Attendons le prochain  sans impatience.

CINEMA

Le monologue d’Hamlet dans le film de 1948 de Laurence Olivier avec Sir William Walton himself, qui hésite, qui doute vertigineusement. en VO

Et par Richard Burton, en 1964, VO., filmé sur scène à Broadway

Franco Zeffirelli se donne des moyens hollywoodiens pour une super production en 1990 (avec Mel Gibson)

La bande-annonce en français du film « Hamlet » 1996 de Kenethh Branagh (avec Gérârd Depaardieu)

Et par Ethan Hawke dans un Hamlet de l’an 2000 (comme lui, j’avais envie de me flinguer quand je parcourais les rayons videos de la FNAC devant tant de médiocrités) VO

Une dernière Vo avec David Tennant, pour la BBC en 2009

Une version du to be or not  to be, en français, extraite de l’Opéra d’Ambroise Thomas… Dussedorf 2006, chanté (?) par Tassis Christoyannis, avec un pistolet en or (?).

ET pour finir, Arnold Scharzenegger (si, si) dans Last action Hero:
Je ne veux pas terminer sans citer « To be or not to be » d’Ernest Lubitsch. film de 1942. dans lequel (on ne peut pas tout citer, de ce chef d’oeuvre de comique dramatique), l’acteur qui vient (plusieurs fois) sur scène pour déclamer le fameux monologue, est un pur cabot narcissique. Hamlet, c’est assez vrai, ne pense qu’à lui.