Les Puritains, opéra de Bellini

« I PURITANI »

Opéra de Vincenzo Bellini

  1. Ne pas se laisser impressionner par le titre. Ni se sentir complexé parce qu’on a complètement oublié les événements historiques qui servent de toile de fond. Il n’est pas nécessaire de connaître la grande Histoire pour  apprécier cette histoire (sans majuscule)  et prendre plaisir au spectacle du BEL CANTO. Quelques mots suffiront sur le sujet de cet opéra. Dans « les puritains », afin que les deux rivaux (le ténor et le baryton aiment la même jeune fille) se regardent encore plus de travers, le livret  les situe  dans deux camps ennemis, en guerre civile, au XVII siècle, en Angleterre..  Le camp dit des « Puritains », (ou « Roundheads », les têtes rondes) est celui des partisans de Cromwell.  En 1649, Ils étaient allés, en vrai, jusqu’à couper la tête du roi de la dynastie des Stuart, Charles I, qui n’était pas assez « rigoureux » à leurs yeux d’extrémistes protestants purs et durs (disons, pour simplifier, que Charles I penchait vers un anglicanisme modéré  : pour en savoir plus, suivez ce lien en cliquant ici,  mais d’autres historiens insistent plutôt sur le fait que Charles I écrasait les bourgeois d’impôts nouveaux..)

    Mais heureusement, Van Dyck avait pris soin de peindre préalablement le roi avec TROIS  têtes en 1635 (Ce travail était destiné au Bernin, Bernini, le sculpteur, afin qu’il réalise un buste en marbre).
  2. Dans l’opéra de Bellini apparaît sa veuve, Henriette Marie de France. Van Dyck a peint  un très beau portrait d’elle en robe bleue, mais je la préfère dans cet autre double portrait de van Dyck,, où elle figure  en robe banche, admirée amoureusement par son royal mari, qui a encore la tête sur les épaules..Les anglais l’appellent « Queen Mary » et dans le livret en italien de l’opéra.les Puritains  le personnage s’appelle Enrichetta di Francia  (sic) : dans l’histoire que raconte cet opéra, il s’agit de la sauver… quel que soit le nom qu’on lui donne.
  3. Il vaut mieux concentrer son attention sur la musique et le chant.  Mon beau-frère, qui est psychanalyste,  aimerait que l’on parle surtout  de la crise de « folie » d’Elvira, la jeune soprano, après qu’elle a vu partir celui qu’elle aime (le ténor) au bras d’une autre femme (Henriette, Queen Mary, Enrechitta, peu importe, ça l’énerve)… Evira, donc, chante au deuxième acte, avec ses fameuses sautes d’humeur, qui succèdent au choc émotionnel, son désarroi confus et sa façon, non hallucinée, d’être là sans y être vraiment… Pendant cette longue scène, émouvante, on se réjouit de la beauté de la musique tout en se désolant du désespoir de la jeune fille … « Les plus désespérés sont les chants les plus beaux. Et j’en sais d’immortels qui sont de purs sanglots »,  (Alfred de Musset, contemporain de Bellini)…. Mais commençons par écouter un extrait, ce grand air « Qui la voce sua save »  en suivant la partition et ensuite nous lirons les conseils donnés par Maria Callas pour son interprétation . . (ici c’est Anna Moffo qui chante)


Les commentaires suivants, à télécharger, sont  la transcription par John Ardoin et des élèves de la Julliard School en 1971-1972 de ce que préconisait Maria Callas : cela commence par cette observation  qu’il y a souvent des scènes de folie féminine dans les opéras, mais qu’il convient de voir ce que chacune a de spécifique..

Ici, la folie spécifique se traduit, entre autres, par des descentes chromatiques en cascades vertigineuses et un redoutable contre-mi final ! Maria Callas a beau détailler comment aborder toutes ces difficultés, cela reste périlleux. D’ailleurs la réputation des Puritains de Bellini a longtemps reposé sur ce côté « virtuose » et risqué des quatre voix principales. Tous les chanteurs vous le diront : leur voix ne produit pas toujours le son tel  qu’ils  le voudraient. Ecoutez plutôt ce qui est arrivé, dans les Puritains, à Cesar Antonio Suarez, au Metropolitan Opera de New York (il y a toujours des spectateurs, au cinéma à Sainte-Livrade, qui me reprochent gentiment « Pourquoi vous ne passez pas les opéras du Met’ ? »)



 Vous pouvez télécharger maintenant  le programme, (synopsis complet et distribution des rôles),

tel qu’il sera distribué à la caisse du cinéma L’Utopie, le dimanche 9 février à 17h30. Tarif unique : 12 euros.

 

Et en bonus, pour finir, un court extrait de ce qui nous attend avec l’admirable  Maria Agresta dans le rôle d’Elvira et Dmitry Korchak dans le rôle d’Arturo.. (Lord Arturo Talbot, pardon). Duo du troisième acte… .

Je ne voudrais pas paraître lourd (comme un certain membre de ma famille aurait tendance à le faire sur ce sujet) mais enfin il faut bien reconnaître que ce duo, mis en scène de cette façon, est une représentation parfaitement idéalisée (sublimée) d’une étreinte amoureuse aboutissant à une fusion  (orgasme simultané) :  ils sont d’abord loin l’un de l’autre, puis elle s’approche, il exprime son attente, il s’agenouille devant elle, puis elle se positionne sur le sol et se place entre ses bras. L’accompagnement orchestral  assure une pulsation qui avance sans jamais faiblir, crescendo. Chacun chante sa mélodie et lorsqu’ils chantent ensemble, lorsque leurs voix, organes du plaisir, se rejoignent, c’est vers un sommet. Un contre-ut, bien sûr. C’est très beau quand ça marche comme ça, de façon synchrone et harmonieuse, en parfait accord. Le plaisir est même partagé par les spectateurs , qui applaudissent et qui sourient…

Rappelons que ce spectacle très romantique est titré « les Puritains » !

Dans l’Histoire, la vraie, au XVII siècle, les Puritains ont très mal finis… l’éphémère république  Morale avec ses « niveleurs » impitoyables a échoué, ils se sont entre déchirés. La paix civile et la royauté ont été rétablies en 1660. Quant à l’Amour…

Philippe Roussel